La tache verte

La tache verte

roman mêlant anticipation, fantastique et science-fiction

tout public à partir de 12 ans

paru en 2013 chez Alice Lyner Éditions

Mais pourquoi la tache verte ?

Idée de base : les humains auraient éradiqué toute vie animale et végétale. Il vivraient dans des villes-pyramides plantées au milieu d’un désert total. Ils se nourriraient de plantes ultra-sophistiquées, génétiquement modifiées, cultivées dans des fermes-tours. Il s auraient une peur bleue que ces plantes merveilleuses soient contaminées par de terrifiantes plantes sauvages. Ils éradiqueraient donc toute plantule aventureuse qui aurait l’audace d’éclore quelque part dans le désert… Ce serait compter sans une mystérieuse et inquiétante tache verte rebelle à toute tentative de destruction.

En même temps, je souhaitais faire passer un message d’alerte assez fort, parce que l’avenir de l’humanité me semble suffisamment angoissant pour que l’on s’en préoccupe sérieusement. Alors j’ai décidé de jouer les colibris : apporter ma minuscule goutte d’eau pour tenter d’éteindre l’incendie. Bien entendu, un seul petit colibri ne peut rien tenter contre le désastre. Mais si les colibris se regroupaient par centaines, par milliers, par centaines de milliers, par millions, ou même par milliards ? Alors l’espoir serait peut-être permis.   

Et voilà, c’était parti…

Une bourse d'écriture

Sais-tu qu’il existe divers encouragements à l’ardu labeur d’écriture ? Les résidences d’auteur, par exemple. L’écrivain ou l’écrivine est invité.e dans un lieu de préférence bucolique. Là, ille n’a aucune autre préoccupation que celle d’écrire. La vraie sinécure, quoi… (Ouh là ! L’écrivine qui s’essaie à l’écriture inclusive ! Ce n’est peut-être pas encore tout à fait au point. Les vieilles habitudes demeurent tenaces.)

La résidence d’auteur, très peu pour moi. J’aime trop écrire dans le cocon douillet de mon chez moi. Reste la bourse délivrée au compte-gouttes par le Centre National du Livre. Pourquoi ne pas tenter de la décrocher ? J’ai essayé une première fois, dans le but d’écrire « Asgrim et le cheval dérobé aux dieux ». Refusée, la bourse. Sans explication. Je savais bel et bien qu’il y a plus de candidats que de bourses disponibles, mais j’ai quand même téléphoné afin de demander : « pour quelle raison ? » (Ça pouvait peut-être me servir pour une prochaine fois.) La personne, au bout du fil, est demeurée assez vague. Elle a fini par marmonner : « projet trop ambitieux. » Ah bon ? Bref, ambitieux ou pas, je l’ai mené au bout quand même.

Après avoir posé une candidature refusée, on doit rester bien sage pendant deux ans avant d’oser réclamer une nouvelle fois.

Ma tache verte, je savais qu’il allait me falloir du temps pour la mener à son terme . Beaucoup de temps. Le fantastique, l’anticipation, ce n’était pas dans mes cordes. La bourse étant censée permettre de dégager du temps pour le consacrer à l’écriture. Pour une écrivine salariée, par exemple, prendre un mi-temps. Ou encore un congé non rémunéré. Mais moi, comment pourrais-je bien tourner cela ? Je vivais de l’élevage des chiens. Je pouvais mettre mes chiennes reproductrices au repos pendant une année, pourquoi pas ? J’aurais toujours à les nourrir, les promener, laver les chenils, mais je n’aurais ni les soins aux chiots, ni le temps consacré à l’accueil des futurs maîtres de mes bébés. Faut pas croire, ça prend un temps fou, ça. Tout ce temps libéré pourrait être consacré à l’écriture. Ouais. Bon ? C’est pas l’tout. Faudrait peut-être d’abord la décrocher, cette fameuse bourse.

Déjà, rien que de monter le dossier, ça m’a pris un mois. C’est qu’ils en demandent, des choses ! D’abord, il faut que le premier chapitre soit écrit. Puis il faut parler du projet. Qui ? Où ? Quand ?Pourquoi ? Comment ?… Et il faut prouver qu’on va dégager du temps pour se consacrer à l’écriture. Pour un salarié : attestation de l’employeur. Dans mon cas : déclaration sur l’honneur.

Il existe trois sortes de bourse :

Une « bourse découverte ». Pour y prétendre, il faut avoir déjà publié un livre à compte d’éditeur.

Une « bourse de création ». La, c’est au moins deux livres qu’il faut déjà avoir publié à compte d’éditeur.

Une « bourse année sabbatique ». Ça ma vieille, compte pas là-dessus.

À l’époque où j’écrivais « la tache verte », la bourse de création pouvait avoir deux montants, en fonction de l’ampleur du projet : 6000 € ou 14000 €. Modestement, j’opte pour 6000. Faut pas demander la lune, quand même.

J’ai envoyé le dossier en Mars, si ma mémoire est bonne. Et puis je l’ai oublié (presque). J’étais lancée à fond dans mon histoire, bourse ou pas bourse, tout en continuant à pouponner mes meutes de petits chiots. Il fallait bien faire bouillir la marmite.

26 Juillet 2008. Jour de la Sainte Anne. Surprise ! Un courrier du CNL. Je l’ouvre d’une main tremblante. Accepté ! Et non seulement accepté, mais ce sont les 14000 € qui vont me tomber du ciel ! Waouh ! De quoi écrire sans me faire de bile… quel fabuleux cadeau!

Malgré tout, il m’aura fallu presque trois ans pour en venir à bout. Il faut dire qu’entre temps, mon compagnon est tombé victime d’une « maladie grave » comme on dit pudiquement. Un foutu cancer, quoi, en termes clairs. Un an d’accompagnement difficile et douloureux, jusqu’au terme. Notre fils avait douze ans. Tout juste treize à la mort de son Papa. Donc tu imagines bien : pas toujours le cœur à plonger au cœur de la tache verte. Ce sont les inattendus de la vie…

Tu es écrivine ou écrivain ? Tu as besoin de pognon pour écrire ton futur roman ? À l’heure où j’écris, la bourse découverte est à 6000 €, les bourses de création à 8000 et 15000 €, et la bourse année sabbatique à 30000 €. Si tu veux tenter ta chance, va vite rendre une petite visite au site du C.N.L. Tu y trouveras toutes les conditions d’attribution.

Quelques critiques

Sur le blog de

Lisa Giraud-Taylor

Tuesday, September 18, 2018

 La Tache Verte d’Anne LabbéUn futur vert forêt inquiétant mais plein d’espoirs !

Le contexte de lecture :

J’ai découvert ce livre parce qu’il apparaissait référencé « Berry », « Contes » et « écologie ». Je dois avouer que j’avais déjà vu le nom d’Anne Labbé au sujet de contes de ce joli coin de France (La Brenne).

Attention, il date de 2013, mais comme je ne connaissais pas cette maison d’édition, je n’avais aucune visu sur leurs parutions. Maintenant, je vais regarder cela de plus près !

Évidemment, de par mes racines familiales qui ont souvent posé leurs valises vers La Guerche, j’ai entendu des histoires sur la magie du Berry, les croyances et sur les fées, et autres joyeusetés qui font le bonheur des enfants curieux.

A la lecture du résumé, je n’ai pas hésité. J’ai joint le service de presse d’Alice Lyner Éditions et ils ont été sensibles à ma demande.

En outre il était indiqué sur la quatrième de couverture que l’auteur(e) apportait là « une vision sur les dérives de la société notamment sur le progrès, l’industrie alimentaire, la place des handicapés et des personnes âgées ».

Comment ne pas être interpellé ?

Le corps du roman :

Anne Labbé est une conteuse, du genre dont l’héritage coule dans ses veines depuis des générations. On le sent lors de la lecture.

C’est fluide, avec des descriptions imagées, pleines de poésie, de détails flamboyants, des jolies phrases et des moments de réflexions.

Ce roman d’anticipation s’étale sur 488 pages sans un seul moment de répit.

C’est comme les longues soirées contées au coin du feu, avec des histoires de fées, d’animaux, de surnaturel et de chaleur humaine.

Dès l’entame, Anne Labbé nous plonge dans ce futur uniforme, aseptisé, contrôlé, millimétré et ultra-sécurisé. Rien ne dépasse dans ces villes-pyramides et Célio, ce jeune botaniste, est l’archétype de la politique de ce Gouvernement Mondial : brillant mais lisse, sous contrôle et plein de certitudes.

Dès que Célio arrive à l’orée de cette tache verte, l’histoire s’accélère, s’approfondit et la vision sur certains problèmes de notre société actuelle.

Sous couvert de cette petite communauté d’humains vivants en marge, cachés, dans cette partie de la Brenne, la place des personnes âgées, des handicapés, ou de l’éducation des enfants.

A partir de ce moment, Célio plonge dans ce monde si différent du sien, avec la bienveillante Angeline, petite fille débrouillarde et intelligente, qui entretient une liaison magique avec une cocadrille (ou cocatrix) !

S’en suivent une initiation, une découverte, une éducation différente que Célio, au début, a du mal à comprendre, à appréhender, à ingérer. Il faut dire qu’il est confronté à tout le contraire de ce qu’on lui a inculqué pendant des années.

Ce botaniste se crée alors une nouvelle sphère, découvre des croyances, des us et coutumes ainsi qu’une nouvelle vision d’un avenir plus en adéquate avec l’ensemble des habitants de la planète, y compris végétaux, et magiques !

Cette tache verte s’étend et prend une ampleur dans notre cerveau ; nous pousse à réfléchir, à entrevoir un avenir peu radieux et des solutions éventuelles.

Et, donc, Lisa ?

J’ai vraiment beaucoup aimé ce livre, dense, réfléchi, intelligent, intéressant et surtout d’une acuité sur notre société et notre futur.

Bien sûr, Anne Labbé pousse le lecteur à la réflexion, à la compréhension, à l’évidente révélation de nos envies profondes, de notre destinée tracée (ou pas). Elle sait conter cette histoire avec des mots simples mais poétiques, une ambiance naturellement magique et profondément humaine.

C’est évidemment un roman d’anticipation mais l’An 2150 pourrait être demain pour nous tous, et malgré que nous soyons habitués à nos vies, nos outils de communication et notre confort, sans, bien souvent, tenir compte de la nature que l’on piétine allégrement, la vie de ces habitants de la Tache Verte fait envie ; Une vie simple, tranquille, à la fois intelligente et ouverte vers l’innovation et la technique, tout en étant en harmonie avec la nature, les animaux et la Terre.

Comme je l’ai dit, j’ai vraiment apprécié mes heures de lecture ; j’ai été happée, envoûtée par cette histoire et les mots de l’auteur(e).Le déroulé de l’histoire est conforme à ce que j’espérais, ou imaginais…Pourtant, si je devais mettre un bémol aux dernières pages, cela serait l’absence de quelques paragraphes entre Célio et Angeline.J’ai trouvé la fin assez évidente, mais belle, pleine d’espoir, tout en étant un peu abrupte, trop rapide par rapport au passé récent de Célio et aux aventures d’Angeline.Ce roman aurait gagné à une réflexion de part et d’autre sur leurs apprentissages, leurs peurs et leurs espoirs.Néanmoins, cela n’enlève en rien, absolument rien, la beauté de conteuse d’Anne Labbé et à ce roman d’anticipation fascinant.

Critique…

d’un prof de français !

La Tache verte

 Anne Labbé, éd.Alice Lyner, Issoudun, 488 p. 24×18,23€.

L’accroissement exponentiel de la population, la menace nucléaire, (militaire, énergie, déchets), l’évolution d’une technologie difficilement contrôlable1, confirment de plus en plus une mutation prévisible de la société, amorcée au XIXème siècle, accélérée au XXème siècle. L’impossibilité pour les prospectivistes d’apporter des réponses crédibles, libère un champ libre aux auteurs de science-fiction. Ex : Le film Oblivion, tourné cette année 2013 avec Tom Cruse, nous transporte en 2077 : sur la Terre ravagée par le feu nucléaire, après des décennies de guerre, un technicien découvre qu’il résiste des survivants…..

Anne Labbé surfe sur ce thème. La Terre s’apparente à un univers martien, toute vie végétale, animale, a disparu ; les « Humains », qui ont survécu (500 millions sur les 9 milliards avant la catastrophe), vivent désormais dans un monde totalement aseptisé qui impose la nécessité de lutter contre toute tentative de « re-végétalisation ». Or, le Haut-Conseil du gouvernement mondial découvre que demeure sur la planète, une minuscule « tache verte » : le parc naturel de la Brenne. Après l’échec de plusieurs expéditions, un jeune scientifique est chargé de se porter dans cette région pour rapporter des feuilles qui permettront de fabriquer un exfoliant superpuissant qui détruira cette oasis inattendue. On s’attend donc à un banal conflit entre les « Hommes nouveaux » (homo scientificus) et les humains retranchés en Brenne (homo sapiens). Il n’en n’est rien. Le génie littéraire d’Anne Labbé est d’introduire une troisième force qui transcende l’humain, la Terre elle-même. 

La trame romanesque permet de maintenir un certain suspens. Un jeune botaniste, Célio Angelson, réussit à s’introduire en Brenne, mais il est aussitôt menacé de mort, il est sauvé in extremis par une Humaine-fée, Angéline. Une relation de complicité s’établit entre eux. Après un an de vie en Brenne, Célio retourne dans sa ville de départ, afin de négocier un modus vivendi. Incompris et considéré comme fou, il est interné. Angéline intervient une seconde fois……. Cette trame est la partie pauvre du roman. Le suspens est faible, languissant. Les dialogues répétitifs et fastidieux, truffés de formules creuses (« n’est-ce pas ? »). L’auteur donne l’impression de « tirer à la ligne ».

L’intérêt est ailleurs. Le roman présente, à notre avis, trois réflexions concrètes qui sauvent le roman de la banalité :

  • Une critique de la nouvelle société : une population totalement aseptisée, informatisée, automatisée, regroupée dans des villes-pyramides ultra protégées, toutes identiques. « Le gouvernement mondial fait régner la paix, les grandes entreprises nutritionnelles parviennent à nourrir le monde entier grâce à des fermes-tours, parfaitement adaptées au paysage urbain » où sont couvées, comme de précieux trésors, des plantes transgéniques. Les habitants, apparemment hautement civilisés, vivent dans des bulles, avant d’être internés, parvenus à un âge avancé, dans des « maisons finales ». Une civilisation technologique où la nature (faune et flore) est totalement absente. Bien que l’auteur ne le précise pas, on suppose que cette uniformité est source d’ennui. Mais cette société a son revers, autrement plus inquiétant. L’électronique nécessite l’emploi de métaux rares comme le coltan. Ces métaux sont extraits de mines où travaillent les « doggies », des sous-hommes, coupables d’avoir désobéi à l’ordre suprême. Comme l’existence de ces goulags doit demeurée inconnue des habitants, ces doggies, n’ont aucun espoir d’être libérés et de sortir vivants.

  • Le deuxième volet met en scène la centaine de survivants réfugiés dans un souterrain au cœur de la Brenne. Le tableau est évidemment l’antithèse du précédent. Les habitants vivent dans une nature luxuriante, privés de tout modernisme, mais ils savent s’adapter à tous les aléas de la vie. Prétexte pour l’auteur de brosser un riche tableau des us et coutumes de la Brenne, et de son artisanat depuis la fabrication des bougies jusqu’à celle de la pâte à papier.

  • L’originalité vient du troisième volet : celui des croyances ancestrales qui remontent à l’animisme des premiers Hommes. Ce sont les Intelligences Magiciennes qui mènent le monde, représentées par les Fades2, aux forces positives, et par les Martes, aux forces négatives. La communication avec les Humains s’établit au moyen des fées (bénéfiques) et des sorcières (maléfiques) qui, envoûtées, possèdent un pouvoir surnaturel3. Ces Intelligences Magiciennes se nourrissent d’Eau, d’Air et de Feu. Le Monde sera sauvé, à la condition de regrouper toutes les forces, non seulement humaines, animales et végétales, mais aussi magiques ! « C’est la terre qui décidera. C’est elle qui possède la puissance (…) nous ne serons jamais que le jouet de ses propres décisions. Nous nous sommes longtemps crus capables de lui imposer notre loi. Au bout du compte, elle saura bien nous imposer la sienne.»

L’écriture (hors dialogues) est maîtrisée. Le vocabulaire est riche (« la lune, pâle et gibbeuse, cerclée d’un halo d’argent ». L’auteur fait preuve, non seulement d’une connaissance ethnographique élevée, mais aussi d’une grande sensibilité, à la fois musicale et picturale.

Ses portraits peuvent atteindre une grande intensité dramatique (cf. la mort de la Vieille Annette, p.465)

Mêlant ainsi une réflexion sur le passé, le présent et le futur, nourri par une intrigue faible mais accessible, l’ouvrage d’Anne LABBE s’adresse à un large public et nous ne pouvons que le recommander. 

1) En particulier au niveau de l’information, avec pour conséquence le délitement de l’Etat qui ne gouverne plus…  Exemple plus ponctuel qui souligne la mondialisation de l’information : un fait divers, filmé de son balcon par un amateur inexpérimenté de Joué-lès-Tours, a été visionné en quelques heures par plus d’un million de vidéastes ! (Nouvelle République du 19-8-2013).

2) cf. George Sand La Petite Fadette.

3) cf. le « héros » grec, né d’un dieu et d’une femme, ou inversement ; le Christ lui-même prolongeant cette tradition, né d’une femme et d’un Esprit-saint.

Revue S!lence

Décembre 2013

LA TACHE VERTE
Anne Labbé
En 2150, ce qui reste de l’humanité vit dans des tours de verre surprotégées, se nourrit d’OGM hors-sol et a éradiqué toute trace de vie animale et végétale sur le restant de la planète. Seule une « tache verte » inconnue résiste à toute extermination. Célio, jeune botaniste, est envoyé pour l’explorer et y prélever des échantillons… La conteuse Anne Labbé donne à voir ce que serait une société qui aurait poussé à l’extrême « la peur de la nature » chère à François Terrasson. La fable du colibri et les méthodes de la « guérilla jardinière » y sont détournées pour figurer une reconquête de la vie sur la folie humaine. Visions futuristes et légendes anciennes du Berry s’y entremêlent, le surnaturel côtoyant le délire technologique. Un récit d’aventures magiques porteur d’une vision écologiste forte, entre critique d’une évolution totalitaire douce des sociétés et éloge de modes de vie chers aux lecteurs et lectrices de s!lence. L’équilibre entre les humains et le vivant est-il possible ?
G.G.

L’écho
10 Mai 2013

Fermes-tours où se cultivent les légumes génétiquement parfaits à l’abri de tous parasites, villes protégées des aléas et des caprices de la nature, humains bardés de garde-fous informatiques,d’implants et de puces électroniques identitaires, le 22ème siècle a changé le visage de la terre. Tout ce qui est sauvage a été éradiqué et l’humanité se concentre dans des villes rationnelles, hygiéniquement impeccables, au milieu de déserts aseptisés.
Et voilà que la nuée de satellites qui surveille en permanence ce monde parfait y détecte une bizarrerie, une étrange et inquiétante tache verte entre Berry, Poitou et Limousin, qui semble indiquer qu’il reste comme un abcès végétal dans cette pureté clinique. C’est la Brenne, le Pays des mille étangs. Un jeune botaniste, Célio Angelson, est envoyé en mission pour étudier les moyens d’éliminer cette anomalie menaçante.
C’est là un thème classique de la science-fiction et du pessimisme quand à l’avenir de l’humanité qui sous-tend beaucoup de ses classiques. « Le meilleur des mondes » d’Aldous Huxley, « 1984 » de Georges Orwell, la dramatique-télé « le jardinier récalcitrant » de Maurice Follevic. La liberté, l’initiative individuelle,le risque, contre une organisation totalitaire. Anne Labbé y rajoute un troisième thème : le fantastique. Mais pas un fantastique technologique, le fantastique venu du fond des âges dont les histoires et les personnages peuplent encore cette terre de légendes qu’est la Brenne. La tache verte n’est pas peuplée seulement de primitifs qui font pousser leurs légumes, traient leurs vaches, mangent leur miel, se soignent avec des plantes et fabriquent leurs poteries, elle l’est aussi d’intervenants surnaturels – les intelligences magiciennes, écrit Anne Labbé, les fées (fades ou martes), le meneux de nuages, le cheval malet, complice du diable, la cocadrille qui a comme chacun sait une tête de coq, des ailes de chauve-souris, un corps de serpent sur des pattes griffues qui crache du feu mais est capable de tendresse. Il y a aussi une adolescente curieuse et frondeuse qui chevauche son sanglier apprivoisé ou la cocadrille elle-même. Elle se prénomme Angeline et comme Célio le botaniste en mission se nomme Angelson, ces deux-là sont faits pour s’entendre. Et en fin de compte, c’est bien sûr la tache verte qui gagne.

Georges Châtain

La Nouvelle République

18 Juin 2013

La Nouvelle république 18 juin 2013

UN ROMAN D’ANTICIPATION AU PAYS DES MILLE ÉTANGS
La sixième publication d’Anne Labbé est un roman à la fois futuriste et fantastique dont le cadre est la Brenne.
Anne Labbé a élevé des chèvres et des chiens, et sa maison est située en pleine campagne, près de la forêt de Lancosme. C’est dans cette Brenne authentique, à quelques kilomètres du bourg de Vendoeuvres et de l’étag de Bellebouche qu’elle charpente ses livres en s’imprégnant sans doute de son environnement. Sa sixième publication fait justement la part belle à un territoire sur lequel elle avait déjà pointé sa plume. Après avoir mis en scène les Amérindiens et les Vikings, elle avait écrit « contes et légendes du pays des mille étangs.
TROIS ANS D’ÉCRITURE.
Elle gomme cette fois le passé pour se projeter en l’an 2150, à une époque où l’humanité vie paisiblement dans des villes-pyramides en se nourrissant exclusivement de plantes génétiquement modifiées, cultivées dans des fermes-tours. Ailleurs, la terre est déserte, la flore et la faune ont disparu… Mais un danger semble menacer ce monde épargné par l’aléatoire et la violence : une immense tache verte qui abrite plusieurs formes de vie. Il s’agit en fait de la Brenne, un univers inquiétant qu’un jeune botaniste est chargé d’explorer en vue de l’éradiquer. Le jeune homme va aller de surprises en surprises, en rencontrant notamment des acteurs légendaires du territoire, dont la Cocadrille et le Lupeux, et finalement s’attacher à ce lieu qui pourrait en fait aider la terre à retrouver son vrai visage.
« Je n’étais pas du tout branchée fantastique mais mon fils Keny, âgé de 17 ans, m’a incitée à m’y intéresser,souligne Anne Labbé. Après m’être beaucoup documentée, j’ai mis trois ans à écrire cette histoire d’anticipation à la trame écologiste et futuriste, dont les trois-quarts se passent en Brenne. »
Une démarche de longue haleine encouragée par une bourse du Centre National du Livre qui avait reconnu au départ la qualité et l’originalité du scénario.

Jean-Michel Bonnin

La tache verte

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