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C’est reparti ! 28/03/2016

20 Mars 2016 : Alunişu-Ciucea 26 km

C’est reparti !!! Sous un beau ciel bleu, mais il fait plutôt froid (-5° dans la nuit, +8° à la mi-journée, petit vent bien piquant !) Océane et Noé ont été très sages pendant les préparatifs.

(Hier soir, elles nous ont gratifiés d’une petite fugue à leur façon. Grand galop au milieu du village, et on les a retrouvées broutant tranquillement un carré d’herbe non loin de l’église !)
Au moment d’atteler, Noé s’est impatientée quelque peu : elle avait hâte de démarrer ! Mais tout s’est bien passé.

« Drum bun ! Drum bun ! »

Depuis hier (hier on a sorti la roulotte au bord de la route) les gens du village viennent nous souhaiter bon voyage. Ce matin, sont près de nous Lars, Robyn et Carsten, bien sûr. Robyn nous offre l’un de ses délicieux pains « faits maison », et Carsten deux petits chevaux en feutrine (l’un pour Oswald, l’autre pour Anne) On les a piqués dans le cœur (offert par la Bernadette, celle de nos montages photos) suspendu dans notre « coin cadeaux »
Merci ! Merci ! Merci ! Lars, Robyn, Carsten. Merci pour ce fantastique accueil de tout un hiver dans votre beau village. Merci pour votre amitié si chaleureuse !

Magda et son fils sont là aussi. Magda a même osé manquer l’office religieux pour venir nous dire au revoir ! Magda nous a lavé notre linge pendant tout l’hiver. Elle nous a fournis en pommes de terre (et on en consomme beaucoup !), en œufs de ses poules, et en lait tout frais de ses vaches…
Nous nous quittons avec de longues embrassades, et les larmes aux yeux !

Köszönöm, Magda ! Köszönöm szépen !

Quant à Szilárd et Ildiko, c’est hier soir que nous sommes allés les saluer. Impossible pour Szilárd de manquer l’office religieux : c’est lui le pasteur ! Nous avons eu droit aux savoureux petits gâteaux confectionnés par Ildiko. Ce Szilárd ! C’est lui qui nous a dépatouillés de quelques problèmes de paperasses. Et qui nous a régalés tout l’hiver avec ses fromages. Quel homme admirable ! Marié, trois enfants, paysan (verger, abeilles, moutons, cochons, volailles, potager… et même fleurs ! Tout est si joli, si bien entretenu, chez lui, avec tellement d’amour) et en même temps chargé des âmes Hongroises du village. Le cœur sur la main, et toujours prêt à rendre service.

Köszönöm Szilárd (for all the things you give us !)
Köszönöm Ildiko (for your beautiful smile and for your little cakes )

Ce n’est qu’un au-revoir ! Promis, on reviendra un jour ! (Par un moyen plus rapide.)

On avait décidé d’une toute petite étape de onze kilomètres, histoire de se remettre dans le bain. Finalement, les juments marchant bien, on a pensé qu’il pourrait être judicieux de s’enfiler les horribles 12 km de route à grande circulation un dimanche entre 11 h et 13 h, plutôt que d’attendre le lundi, quand les gros poids lourds y roulent presque touche à touche. Ce que nous avons fait. On n’échappe pas totalement aux camions : en Roumanie, ils se fichent pas mal de l’interdiction de rouler le dimanche. Mais bon… Y’en a quand même moins qu’en semaine.
Juste à la sortie de Ciucea, après avoir quitté la fameuse route n°1 de Roumanie (C’est celle qui va de Vienne à Istanbul) regardez-moi ça ! Derrière la station d’épuration, un joli ruisseau. De la place pour la roulotte.

Sur les arbres commence à apparaître un frémissement vert pâle. L’herbe est très rase, mais on venait à peine de s’arrêter qu’une famille de Tziganes est justement passée par là, avec des chevaux attelés, l’un à une caruţa chargée de foin, l’autre à une caruţa chargée de bois. On a donc pu acheter du foin d’excellente qualité. Il sent si bon qu’on aurait presque envie d’y goûter. Les juments se jettent dessus avec voracité !

Le soir : un superbe troupeau de brebis turkana et leurs agneaux, accompagnées de quelques chèvres de Carpates, passe de l’autre côté du ruisseau. Vite ! Vite ! Je sors avec l’appareil photo !
Et merde… Les flics ! C’est foutu pour les photos. Bon, ils sont gentils, ces flics-là. Ils nous interrogent. Ce qui les tracasse, c’est de savoir comment on fait pour avoir des sous. Faudrait pas qu’on vive aux crochets des citoyens Roumains, quand même ! Bien entendu, on doit montrer nos passeports. En tout cas, ils semblent ravis qu’on leur donne l’adresse de notre site. Les pauvres, ils n’auront pas de bonbons : on est en panne sèche.

21 Mars

On reste ici pour aujourd’hui. Pourquoi ? On a oublié notre planche « siège passager » ! (Des fois qu’on voudrait embarquer un roulotte-stoppeur.) j’ai dit à Oswald qu’on aurait bien l’occasion d’en retailler une un jour ou l’autre, mais il a préféré repartir en stop jusqu’à Alunişu pour la récupérer. D’un autre côté, ça ne va pas faire de mal aux juments de prendre une journée de repos après l’étape un peu dure imposée hier. Et pas de mal à mon pauv’dos, non plus !
Raté ! Oswald a fait un tour pour rien : il n’a pas retrouvé la planche...

Le soir : le troupeau de moutons re-passe ! Vite ! Vite ! Je sors avec l’appareil photo ! Pas de flic en vue… Clic ! Clic !

22 Mars : Ciucea – Plesca 22km

Démarrage très ardu : pour sortir de notre bel emplacement, rude montée sur chemin de pierre, au bout duquel, toujours en montée, il faut tourner très serré vers la droite. Les juments ont un mal fou à arracher la roulotte ; elles tournent trop sec, Kaplumbağa ne suit pas. Je m’égosille pour encourager les louloutes : « Allez ! Allez ! Allez ! » Je crie à Oswald de venir pousser le côté gauche de la roulotte pour aider, mais il ne comprend pas. J’ai commis une erreur : j’aurais dû continuer davantage tout droit, comme s’il avait fallu aller à gauche, puis tourner ensuite seulement vers la droite. La roulotte se serait trouvée moins en montée pendant le virage. Heureusement, aucun camion n’est arrivé au même moment ! Un cycliste nous a observés, un sourire narquois aux lèvres. Mais elles l’on fait, les belles ! Elles ont mis à l’ouvrage un cœur énorme, et elles s’en sont sorties !!!
Après ce coup de collier un peu violent comme apéritif : 10 kilomètres de montée continue.
Pas trop trop pentus, mais ça grimpe sans cesse. Pas un replat ! Et au bout de tout ça, une belle côte à 12 %, pendant un bon kilomètre, avec plusieurs épingles à cheveux bien corsées… Le col, avec sa belle croix en pierre. Après quoi, il faut descendre. Plus raide que la montée, la descente. Et avec quelques belles épingles à cheveux, elle aussi. (Si tu veux une petite idée : environ 11 km km de montée, puis 8 km de descente) Heureusement, les freins ont tenu le choc.
Les juments commencent à en avoir plein les jambes ! Vite, vite ! Une halte !
Eh ben pas moyen ! Quand y’a de l’herbe, y’a pas d’eau. Quand y’a de l’eau, y’a pas d’herbe. Et quand y’a de l’herbe et de l’eau, y’a pas de place pour Kaplumbağa.
Ouf ! Environ deux kilomètres après la sortie de Plesca, enfin ! Un beau pré, un emplacement facile à atteindre pour notre roulottine, et un joli ruisseau. C’est en pleine cambrousse.

Après tous ces efforts, Océane et Noé sont trempées de sueur. Le vent est extrêmement frais. On leur pose les couvertures pour qu’elles ne se refroidissent pas trop brusquement. On les leur enlèvera dès que le poil aura séché. Il faut bien les dorloter un peu, les louloutes, mais pas trop : pas question de les priver de la légendaire rusticité du Fjord. (D’ailleurs, c’est seulement Papa, qu’est un vrai Fjord. Maman, c’est Trotteuse. Déjà un peu plus civilisé, comme sang. Donc un peu moins robuste.) En outre, on se rappelle trop la forte poussée de fièvre de Noé, qui nous a coûté 3 semaines d’arrêt en Italie. C’était suite à une semaine de pluie froide et continue, sans couverture. C’est après ce coup du sort qu’on les avait achetées, ces fameuses copertas. On les utilise le plus rarement possible. On sait, on sait, y’a les pour et y’a les contre. On essaie d’agir avec bon sens, en fonction des circonstances, et sans trop de sectarisme. Et bien sûr, des fois on se goure ! Ça nous sert de leçon. Les chevaux sauvages n’ont pas besoin de couverture, soit. Mais à ce que je sache, les chevaux sauvages n’ont jamais l’occasion de piquer une grosse suée en tirant une grosse roulotte tout le long d’une grosse montée. Tu veux voir ?

Miam ! La bonne crème chantilly ! (dixit Oswald) Et pas la peine de nous engueuler, hein ? On n’a pas toujours le choix ! C’est la faute au poil d’hiver qu’est pas encore tombé. Il forme un manteau trop chaud pour l’effort fourni. Un refroidissement brutal dans cet état là, on a un peu peur des conséquences. Voilà le pourquoi de la couverture, qui maintient le corps au chaud le temps que le poil sèche doucement.
Bon, allez, je te rassure, quand même : la crème chantilly, c’était en cours de route, tout en haut de la montée. Avant d’arriver, un long temps de pas les avait quand même déjà séchées un peu, les louloutes ! Mais pas complètement quand même.

J’ai dit joli ruisseau :

mais on est en Roumanie, quand même !

Dans la soirée, spectacle insolite (pour nous !) Un magnifique cheval entier, attelé à sa caruţa, tracte un camion qui était resté là, en panne d’embrayage. L’étalon semble plus intéressé par les bonnes odeurs qui émanent de nos juments que par le travail qu’on lui demande de fournir. Il hennit, fanfaronne, joue les beaux mecs. Il se fait engueuler, et obéit quand même à son seigneur et maître.

23 Mars : Plesca – Huseni 15 km

On prépare les juments dans un petit matin bien frisquet. Normal : On approche de Pâques, et c’est bien connu qu’à Pâques, il fait toujours froid !

Océane et Noé sont vraiment super. Moi qui craignais un peu la reprise… j’avais tort.
On croise vraiment beaucoup de chevaux, dans ce secteur.

Mais c’est la première fois depuis notre entrée en Roumanie qu’on en voit un mené par des femmes !

Et les cigognes sont de retour ! Voilà qui nous console un peu du vent glacial. Tu peux remarquer que les cigognes profitent du plastique qui traîne partout pour consolider leurs nids !

On traverse un village Tzigane.

de bric et de broc.

toits de plastoc tenus par des planches branlantes… mais antenne parabolique !

La marmaille nous salue avec enthousiasme et nous suit pendant un bon moment !

La route n’est pas asphaltée, il y a des trous partout, ça secoue fort ! On est obligés de s’arrêter pour chausser Océane, qui marchait pieds nus. Trop de cailloux. Après 5 mois à ne rien faire, dans une jolie friche au sol souple, les sabots se sont attendris, et Océane ne semble pas trop à son aise. Il va falloir quelques étapes pour recommencer à s’endurcir !
Après la sortie du village, un peu isolée, l’école Tzigane.

Je crois en avoir déjà parlé, mais je rappelle qu’en Roumanie, les minorités linguistiques ont le droit de recevoir l’enseignement dans leur langue maternelle, dès les toutes petites classes. C’est valable aussi pour le romani, la langue des Tziganes. Bien entendu l’apprentissage du roumain est obligatoire. Du coup, les enfants qui fréquentent ces écoles sont très tôt parfaitement bilingues.
Et c’est là, juste à côté de cette petite école, que nous trouvons notre halte. Pas besoin de préciser que les enfants sont ravis. Les maîtresses aussi.

Sans corvée d’eau ! Il y a une belle mare au milieu du parc des juments.

Mais quand on ouvre la porte de Kaplumbağa, ouh là là !!! Les nids-de-poules de la route ont bien travaillé !

24 Mars : Huseni – pas tout à fait Ip 13,5 km

Ciel tout gris, 4° au thermomètre, pluie glaciale. Brrrr…. Pas très engageant. Allons, allons ! Quand faut y aller, faut y aller ! C’est ça l’aventure !
La route aux nids-de-poules n’est pas terminée. Il faut se la farcir encore 7 bons kilomètres. Au pas. Océane et Noé ne sont pas contentes. C’est quoi, cette allure d’escargot ??? De temps à autre, elles ne peuvent pas s’empêcher de se lancer quand même dans une allure un peu plus vive. On entend les trucs et les bidules qui dégringolent à l’intérieur de la roulotte. "Oh ! Là ! Doucement ! Doucement !" Elle m’obéissent, mais retentent le coup 5 minutes plus tard.

Kaplumbağa cahote. (K.1.-K.A. ça te dis quelque chose ?) Ça va encore être joli là-dedans à l’arrivée.

Des dizaines et des dizaines de chiens sortent de partout. Des tout petits et des géants. Gueulards. On n’attache ni ne renferme les chiens chez les Tziganes. Il se précipitent sur Altaï, babouines retroussées, crocs à découvert, poil hérissé raide sur l’échine. Notre gros toutou conserve un flegme imperturbable. Il avance, très digne, sur le côté droit de la roulotte. Si l’un des clébards s’approche un peu trop, Altaï se retourne et lui assène l’un de ses énormes « Wouf ! » très graves, très calmes et très impressionnants. Un seul suffit. Le molosse fait demi-tour, la queue entre les jambes.
Altaï pourrait donner des cours sur le thème : « Comment répondre de manière non-violente à une agression violente. » Pas un seul chien, même parmi les plus gros, n’a osé s’en prendre à lui.
Et d’ailleurs, ici, même les cochons vivent en totale liberté.

Partout, on nous salue avec de joyeux signes de la main. On nous invite même à prendre le café. On refuse avec le sourire et un grand merci : on vient juste de démarrer, on ne va pas déjà s’arrêter.

On en a fini avec les cahots. De nouveau le goudron. Village tout peuplé de Hongrois, cette fois. Village hongrois tout court, d’ailleurs. Qui s’étire sur des kilomètres, avec ses maisons proprettes et ses petits magasins, exactement comme en Hongrie. Contraste saisissant, à seulement 10 km de décalage.
Un peu avant d’arriver à Ip, une prairie en friche, avec une herbe abondante. Un beau fossé plein d’eau. Oswald voudrait bien avancer encore un peu. Mais moi je suis frigorifiée. J’en ai mon compte pour aujourd’hui. Et puis d’ailleurs, on ne sait pas combien de kilomètres il faudra encore faire avant de trouver un emplacement aussi adéquat.

Jarnicoton ! J’ai bien fait d’insister pour qu’on s’arrête. Le collier a blessé Océane ! Ce n’était encore jamais arrivé, ce truc. On a renvoyé nos bricoles en France quand on a largué la remorque, en Italie, et qu’il avait fallu faire un tri drastique parmi nos affaires. Donc pas moyen de changer la méthode d’attelage.
Rien de très méchant pour l’instant, mais il va falloir prendre ça très au sérieux. Vite, vite, notre « bible » ! Le merveilleux bouquin d’Émile. LE Émile Brager. Le bréviaire indispensable de qui veut voyager avec des chevaux, ânes, et autres mulets. Table des matières. Chapitre « plaies de harnachement ». Page 463 : la plaie de collier ou d’avaloire.
Voyons voir… Hormis la pommade au calendula, tous les trucs possibles, on les a : bétadine, propolis, bickmorine, vaseline, et même… huile de table, au cas où on n’aurait rien d’autre sous la main. On a même de la chambre à air, au cas où cela s’avérerait nécessaire. Si avec tout ça on ne la soigne pas, notre Océane ! Pour repartir, on va essayer aussi d’enlever le pad du collier. Ça fera le collier un peu grand, mais ça changera les points de friction. Et si ça devient indispensable… ben on s’arrêtera quelques jours, pour ne pas changer nos bonnes vieilles habitudes. Ah non ! D’habitude, c’était Noé.

En attendant, on profite du coucher de soleil.

25 Mars : Ip – Dolea 13,5 km

Ce matin, Oswald se désespérait de ne pas trouver de violette. Il a pour coutume de commémorer l’anniversaire de sa maman, chaque année, le 25 Mars, en cueillant un bouquet de violettes. Mais, miracle, il a fini par en trouver UNE !

On ne démarre qu’à 11h30 ! Océane et Noé avaient décidé de faire la grasse matinée et dormaient. On n’a pas osé les réveiller. Noé dort presque toujours debout, tandis qu’Océane préfère se coucher pour piquer son roupillon. Pas de danger, puisque la frangine monte la garde ! Souvent, même, elle s’allonge de tout son long, la tête posée au sol, totalement immobile, si bien qu’à chaque fois (je devrais pourtant y être habituée) j’en ressens un coup au cœur. Elle est pas morte, quand même ? Je m’approche, elle ouvre un œil et se paye carrément ma tête.

En plus des préparatifs habituels, il faut soigner le bobo : vaseline gorgée d’huiles essentielles cicatrisantes.
On ne fera qu’une petite étape de toute façon.
Et tiens, justement, on ne peine pas à trouver, aujourd’hui. Un emplacement un peu à l’écart de la route, un pré bien juteux plein d’herbe nouvelle d’un beau vert tendre, et une petite mare au milieu. Juste derrière le centre culturel du bled, près d’un terrain de foot en pelouse artificielle.

Ouf ! Le bobo d’Océane n’a pas empiré. Je lave, je soigne. Demain, on restera là. Curieux, quand même, cette blessure. Depuis le temps que les juments les portent, ces colliers, on n’avait jamais eu le moindre problème. Bon, quand on se demande :
" pourquoi le problème ?" ça ne le résout pas. Mieux vaut se demander :
" comment le régler ?"
Malgré tout, la recherche du pourquoi ? peut permettre d’éviter la récidive... si on trouve la réponse !

On profite du ciel tout bleu et du grand soleil pour tout laver, tout étaler, tout faire sécher !

26 Mars

Depuis longtemps les jument n’avaient pas pu brouter une herbe aussi savoureuse. Elles s’empiffrent. On va rester là une journée pour qu’elles puissent en profiter. Elles ne l’ont pas volé ! J’en profite pour masser le bobo d’Océane aux huiles essentielles. C’est déjà beaucoup moins sensible qu’hier. Je ne suis pas encore complètement rassurée, mais l’optimisme semble plutôt de mise.
Oswald a découvert un tout petit magasin à proximité de Kaplumbağa. Il se charge d’aller renouveler nos provisions.
Il se charge aussi, le pauvre, de la corvée de bois : aller jusqu’à la forêt, en revenir en traînant derrière lui de longues branches de bois mort, et… « Scions, scions, scions du bois... » Tu connais la chanson ?

Pendant se temps, qu’est-ce qu’elle fiche, la Anne ? Elle est confortablement installée dans son petit coin douillet, à se vautrer dans son plaisir d’écrire ! Exercice tout à fait salutaire pour l’agilité des doigts.
Mais pas que. La couture aussi, c’est bon pour l’agilité des doigts. Dans son petit topo sur la plaie de harnachement, Émile Brager conseille donc… la chambre à air. Mais comment adapter ce truc dans notre cas ? Bon, allons-y pour la couture. On met le collier à Océane, on prend les mesures, je coupe un bout de chambre à air, et je couds les deux bouts, là où ça ne touche pas la peau. (Manquerait plus que les coutures provoquent une nouvelle plaie !)

27 Mars : Dolea – Abrămuţ 21,5 km

Avant le départ, je badigeonne le bobo d’Océane d’une belle couche de vaseline imbibée d’huiles essentielles, et je badigeonne le bout de chambre à air cousu au collier avec de l’huile de tournesol. Les soins donnés hier ont déjà porté leurs fruits, semble-t-il.
Les juments marchent décidément très bien. Elles sont sages, Océane paraît beaucoup plus à l’aise que lors des deux dernières étapes.
Une station service ! On s’arrête pour refaire la pression des pneus. (depuis notre départ, on en a croisé plusieurs, mais elles n’offraient pas ce service)

Le pompiste est tout heureux ! Il ne reçoit pas tous les jours ce genre de véhicule !

Après nous avoir gonflé nos pneus, il nous mitraille avec son appareil photo. Pendant ce temps, Oswald s’achète son petit plaisir : une bouteille de Pepsi.

Oh ! Ça faisait des années et des années qu’on n’avait pas vu ça ! Un passage à niveau avec petite maison de garde-barrière, et fermeture à manivelle !

Le long de la voie ferrée, le télégraphe est toujours là.

Question de la Anne : « C’est quoi, ces grands machins bleus et jaunes qui se balancent ? »
Réponse du Oswald : « Quoi ? Comment ? Tu ne sais pas ? C’est l’extraction du pétrole, voyons ! Tu sens cette odeur ? Typique ! »
On traverse une région pétrolifère. Ben quoi ? Non, je ne savais pas que la Roumanie produisait du pétrole. On s’instruit, en voyageant !

On pense s’arrêter près d’un cimetière, mais l’herbe est rase, il y a des détritus partout, et finalement même pas d’eau. On continue, donc. Sans regret. Quelques kilomètres plus loin, nous sommes accueillis par Laci, Erika, et leurs deux enfants adultes : Laci aussi, et Anett. Dans leur ferme isolée, oasis d’arbres et de fleurs au milieu de monotones grandes cultures. On nous offre une paisible prairie

… et le traditionnel repas de Pâques ! Un véritable festin !

Parents et enfants travaillent ensemble sur la ferme : apiculture

production de lavande

Ils n’ont pas de vigne, mais ils achètent du raisin bio dans la commune voisine, et élèvent leur propre vin dans leur belle cave.

On entre.

Dégustation !

On nous offre des fruits au sirop, fabrication maison.

Laci junior et Anett viennent à leur tour visiter Kaplumbağa.

PS : super, le truc de la chambre à air. Non seulement la plaie ne s’et pas aggravée, mais c’est beaucoup mieux : le massage doux avec la vaseline et les huiles cicatrisantes a fait son petit effet.

28 Mars : Abrămuţ – Săcuieni 16,5 km

On venait de terminer notre petit déjeuner, quand Anett est venue nous inviter à partager celui de la famille. On n’a pas osé refuser. Et les restes des petits gâteaux de Pâques étaient trop bons. On va partir le ventre un peu chargé !
Cadeau supplémentaire : 3 kg de miel, production maison. Köszönjük Laci, Erika, Laci, Anett !
Paysage du jour : bof ! on se croirait en pleine Beauce. Champs cultivés à l’infini. La route est un tout petit peu moins mauvaise qu’hier, mais on doit se farcir quelques longs passages sur pavés. Même au pas, tout tranquillement, ça secoue dur. Ça nous donne une idée du confort des voyages en diligence, autrefois. Avec des roues sans pneus…
Rien que des champs labourés ou ensemencés, avec les céréales qui pointent le bout leur verdure. À perte de vue. Ah ! Là ! À la sortie de Săcuieni (prononcer sacouyenne) Une espèce de blockhaus entouré d’herbe bien verte, et le ruisseau à côté. Un chemin de pierre mène jusqu’à un terre-plein, à quelque distance de la route. C’est vraiment pas esthétique, mais faute de mieux… On s’engage là-dedans. Deux petits chiens viennent à notre rencontre en jappant. Un homme sort d’un bloc de béton cubique, orné d’un rideau à l’unique « fenêtre ». C’est le gardien du lieu. Il loge dans cet horrible bunker. Il nous accueille fort gentiment. Aucun problème pour passer ici une nuit. La barre d’attache pour les juments est bien costaude !

Paysage de rêve, vraiment !!!

Oswald veut offrir un petit verre de pálinka à ce gentil gardien. Il refuse en montrant le badge qu’il porte accroché à sa veste : « gardien d’élite ». Il n’a pas le droit de boire une goutte d’alcool. « Le patron l’interdit », explique-t-il.
Et voilà, nous sommes tranquillement installés, quand s’arrête un gros 4X4. Un Monseigneur rougeaud et chauve, en costume impeccable, allure autoritaire et décidée, en descend. Il nous intime très ferment l’ordre… de ficher le camp ! « Tout est privé, ici ! Il y a un gardien ! (ben oui, on sait : c’est le gardien qui nous a donné l’autorisation de rester, justement. Mais on n’ose pas le dire. Vu le comportement du Monsieur, on n’imagine déjà que trop le savon qu’il va se prendre, le pauvre gardien d’élite !) On parlemente. Ça nous rappelle l’Italie. Et tiens, justement, il parle l’Italien ce Monsieur ! Négociations dans cette langue. Je lui décoche mon plus radieux sourire et je supplie : « Juste pour une nuit ! Y’a pas de mal ! » Aucune influence, le sourire. S’il a vécu en Italie, ça a dû sacrément déteindre sur lui. Il menace d’appeler la police. Oswald lui dit qu’il peut le faire (Par expérience Italienne, on sait qu’un policier pas trop borné peut souvent valablement servir de négociateur) Grosse surprise du type, qui ne s’attendait pas à ça. « Je vais appeler le maire, finalement, dit-il. Vous comprenez ce que c’est, un maire ? » « Oui ! Oui ! Bien sûr ! Appelez-le »
Suit une longue conversation téléphonique, en Hongrois. (Là, on pige pas grand-chose). Pendant ce temps, le gardien se tient debout à quelques pas, tête basse, l’air tout penaud. Le Monseigneur raccroche, et cette fois, c’est lui qui sourit : « Bon, c’est OK, vous pouvez rester. » Il nous tend la main… et ordonne sèchement au gardien d’aller fermer la barrière. (Il y a effectivement une barrière, style barrière de passage à niveau, qui était ouverte.)
Le voilà parti. « Tu comprends pourquoi je peux pas boire de pálinka ? » dit le gardien à Oswald.

Voilà. C’est notre dernière étape roumaine. Demain, on repasse en Hongrie. Espérons qu’on ne soit pas obligé de vider toute la roulotte pour prouver qu’on ne transporte pas un passager clandestin !

Quelques remarques

- Au sujet des petits chevaux offerts pas Carsten : ils sont fabriqués par une petite entreprise familiale de Sâncraiu, qui fonctionne fort bien, et exporte même à l’étranger. Le monsieur s’occupe de la gestion et de la vente. La dame dessine les modèles : toutes sortes d’animaux minuscules et variés. Et ces bestioles de feutre sont découpées et cousues par des dames du village qui travaillent à leur domicile. Tout est « fait main » avec une incroyable précision dans les tout petits points de couture. Le but, c’est de démontrer qu’on peut travailler en restant au pays, même dans un village perdu au cœur de la Transylvanie.

- Apparemment, les villages tziganes ne sont pas prioritaires dans le budget « asphaltage des routes » balancé par l’Europe.

- La Roumanie est un des premiers pays d’Europe où du pétrole brut a été trouvé et exploité à grande échelle. Les premiers forages commerciaux remontent à 1857. Mais comme partout, ça s’épuise : 90 % des puits de pétrole roumains sont matures. Leur production diminue de 10 % par an. L’utilisation de techniques nouvelles (injection de vapeur) pourrait accroître un peu leur longévité. Mais la Roumanie travaille plutôt d’arrache-pied à réduire sa consommation d’énergie. À Bucarest, les immeubles de La période communiste font l’objet d’un vaste programme de rénovation et d’isolation principalement financé par des fonds européens. Objectif : diminuer de moitié la consommation de gaz et réduire les émissions de CO2. La Roumanie investit massivement dans l’éolien le solaire et les biogaz. Bucarest l’a bien compris : seule une transition de l’or noir vers l’or vert garantira la sécurité énergétique du pays sur le long terme. Quand même… On a découvert des gisements au fond de la mer Noire qui ne semblent pas si mal venus !

Anne, 28 Mars 2016

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